December 24, 2011

Actualité des noms de domaine en décembre 2011

Généralités
Des chercheurs ont mis en évidence que, sur un moteur de recherche, nous tendons à sélectionner les résultats en fonction des noms de domaine (plutôt qu'en fonction des extraits de page présentés par le moteur). L'étude Domain Bias in Web Search  est disponible ici.
Ces derniers jours de décembre ont aussi permis de mettre en lumière le pouvoir singulier que peuvent avoir les clients de registrars. Le plus important d'entre eux, GoDaddy, a vu fuir des milliers de clients après avoir pris position en faveur du projet de loi américain SOPA. En quelques jours, 37.000 noms de domaine n'auraient pas été renouvelés selon VentureBeat, phénomène qui serait en lien direct avec le soutien de GoDaddy à ce projet qui permettrait de bloquer des noms de domaine associés à des contenus dont il serait allégué qu'ils sont contrefaisants. GoDaddy a changé casaque depuis... Cela pourrait-il annoncer d'autres frondes, par lesquelles les utilisateurs de Gmail ou Facebook chercheraient à faire pression sur leur prestataire de services ? Il existe une différence significative : les noms de domaine sont des commodités, ce qui rend aisé le changement de registrar, alors que la difficile portabilité des données stockées sur un webmail ou sur FB  n'autorise pas la même volatilité.

.ar

Un article de la dernière Revista El Derecho Informatico (n° 10, déc. 2011, pp. 5-10) est consacré aux particularités des noms de domaine argentins. On apprend par exemple que le nombre maximal d'enregistrements par personne est de 200.

.eu
Tous les deux ans, la Commission doit faire au Parlement Européen un rapport sur la mise en œuvre, le fonctionnement et l'efficacité du domaine de premier niveau .eu. Lecture peu passionnante. On apprend qu'un tiers environ des noms sont utilisés à des fins économiques (ce qui amène à se demander à quoi servent les autres), moins de la moitié de ceux-là étant associés à des sites commerciaux sur lesquels il est effectivement possible de passer commande. Sur le plan contentieux, il y a environ 13 affaires par trimestre devant le centre de règlement des litiges.

.fr
Chacun est invité à remplir le questionnaire sur la gestion des domaines français (qui ne porte donc pas que sur le .fr), dont la publication est le préalable à un nouvel appel d'offres pour la gestion de ces extensions.
L'AFNIC a aussi publié son Observatoire 2011 des noms de domaine.*
Son DG a annoncé sur Twitter que les premières décisions Syreli seront bientôt publiées. L'occasion de formuler un voeu pour 2012 : qu'elles ne soient plus mises en ligne au format pdf mais en xml, de façon à faciliter les recherches ! (voeu étendu aux décisions UDRP).

.in
Dans un contentieux portant sur le nom internet.in, il a été jugé que... ce nom devait être supprimé de la base ! Explications sur Spicy IP.



* que l'on pourrait rapprocher de l'ouvrage nouvellement paru Sociologie des prénoms de B. Coulmont (La Découverte), qui tente de répondre à des questions comme : pourquoi et comment choisit-on un nom ? Quels sont ses usages sociaux ? Y a-t-il des modes ? etc. D'une certaine manière, le rapport de l'AFNIC et le livre du sociologue traitent des mêmes problématiques.

December 03, 2011

Blogging en retard

Beaucoup d'actualités autour des noms de domaine ces derniers jours, et si peu de temps pour les traiter correctement, malheureusement ! A noter :

1. La régulation de l'internet par les noms de domaine continue

Aux Etats-Unis, se poursuit la discussion législative autour de l'adoption du glaçant projet SOPA (Stop Online Piracy Act). Rappelons qu'il donne des prérogatives exorbitantes à certaines autorités américaines, permettant aux titulaires de droits d'outre-Atlantique d'obtenir des sanctions contre des sites étrangers, sans garanties pour ces derniers. Pendant, ce temps, les Douanes américaines ont saisi de nouveaux noms de domaine (130 le 24 novembre, 11 autres hier).
Et toujours aux USA, mais au terme d'une procédure judiciaire cette fois, Chanel a obtenu qu'il soit ordonné à un registre de changer le registrar de plusieurs centaines de noms contrefaisant sa marque, d'ordonner à l'actuel registrar (GoDaddy) de changer les DNS de ces noms pour qu'ils redirigent vers un site où se trouve une copie de la demande formée contre leurs titulaires, l'autorisation de saisir ces noms dans Google's Webmaster Tools (aux fins, semble-t-il de demander leur désindexation), et celle d'empêcher leur redirection. Chanel a aussi obtenu qu'il soit ordonné à Google, Bing, Yahoo, Facebook, Google+ et Twitter de désindexer et/ou supprimer ces noms de leurs résultats de recherche.

En France, dans une action judiciaire dirigée contre différents sites référençant des vidéos illicites, il est demandé au juge non seulement le blocage de noms de domaine, mais de s'assurer, une fois cette mesure ordonnée :
- que l'adresse DNS ou l'adresse IP bloquée conduise toujours aux contenus illicites (dans le cas
inverse, les mesures de blocage devront être levées) ;
- que le site ne soit pas accessible via un autre nom de domaine et/ou via une adresse IP tierce.
Il est donc demandé une mesure évolutive, dont on verra - si le juge venait à l'ordonner - si elle est adaptée au jeu du chat et de la souris qui se déroule depuis plusieurs années entre les ayants droit et les sites visés (en l'occurrence alloshowtv.com, allomovies.com, alloshare.com et allostreaming.com).

Rappelons que l'ISOC avait pris position contre le filtrage DNS, car la modification unilatérale du DNS entraîne d'importants risques de sécurité, ne résout pas le problème, crée d'importants dommages collatéraux (techniques comme non techniques). L'ISOC considère qu'il faut toujours s'attaquer à la source, en renforçant la coopération internationale. Quant au Parlement Européen, il a adopté mi-novembre une résolution dans laquelle il "insiste sur la nécessité de protéger l'intégrité de l'internet mondial et la liberté de communication en évitant toute mesure unilatérale destinée à révoquer des adresses IP ou des noms de domaines".


2. Nouvelles règles pour les noms de domaine français

Après avoir formalisé ses relations avec l'ICANN un mois plus tôt, l'AFNIC a publié une nouvelle charte de nommage, en vigueur à partir du 6 décembre 2011. Outre que les enregistrements et autres sont ouverts à tous les particuliers et entreprises européens, désormais il n'y a plus d'un côté des règles d'enregistrement du .fr et de l'autre d'autres règles spécifiques aux .re et consorts : la charte porte sur l'ensemble des extensions françaises.


3. Droit de la concurrence 
Des société exerçant sur le créneau "adultes", Digital Playground et Manwin (qui sont à la tête notamment de YouPorn.com), a engagé une action antitrust contre l'ICANN suite au lancement du .xxx. Selon elle, cette décision a obligé de nombreux sites web à sécuriser leurs marques par le biais des defensive registrations... et donc été forcées à dépenser de l'argent.
Il a beaucoup été dit que cette action peut aussi être un test de l'applicabilité des règles de la concurrence avant l'ouverture prochaine de nombreux gTLD. L'enjeu de l'affaire ? La régulation des prix et des conditions d'enregistrement définies par les futurs registres, et les conditions de l'allocation d'une extension.