La Mutuelle civile de la défense propose ses services sous la marque “
Mutuelle Civile de la Défense MCDef". Elle reproche à un cabinet qui propose l'établissement de devis en ligne d'utiliser cette marque de façon irrégulière.
Elle a constaté que la saisie de la requête “
mutuelle civile de la défense” sur Google permettait d'accéder à une page du site de ce cabinet sous-titrée “
mutuelle civile de la défense” avec la mention “
nous ne travaillons pas avec cette mutuelle mais nous vous proposons un article sur cette mutuelle de qualité”. Suivait une présentation de la mutuelle puis d'autres pages relatives à d’autres mutuelles et aux coordonnées du Cabinet.
Ce contentieux n'est pas né dans le contexte "classique" du référencement payant (AdWords), mais de référencement naturel. Le juge va en tenir compte, pour estimer que faute pour la demanderesse "
d’avoir fait constater par huissier de justice quels étaient les mots choisis par le défendeur pour déclencher le référencement de son site internet par le moteur de recherche Google, le tribunal ne peut se fonder sur une simple probabilité pour retenir une contrefaçon de la marque “mutuelle civile de la défense”". Le juge en conclut qu'il n'y a pas ici de contrefaçon par un usage de la marque pour le référencement du site du cabinet.
En revanche, il estime que l'usage de la marque sur les pages du sites est un usage non autorisé par la demanderesse, et donc un acte fautif de contrefaçon. Pour arriver à cette conclusion, il constate que le cabinet annonce un service de comparaison, mais ne fait que mettre à disposition "
une page de présentation générale de la mutuelle et de ses produits sans fournir aucune donnée chiffrée susceptible d’être comparée". Il relève aussi que la marque “
Mutuelle Civile de la Défense MCDef" sert à attirer le consommateur sur un site qui ne propose pas les services du titulaire de cette marque... or la pratique de la marque d'appel est passible de sanction.
Outre ces éléments, le juge a aussi tenu compte du fait que le défendeur utilisait pour son site le nom
mutuelle.com. Un tel nom "
conduit naturellement [l'internaute] à penser qu’il se trouve sur un site consacré aux mutuelles et non pas sur un site de courtier". Il ajoute que "
l'emploi de ce nom de domaine ne permet pas à l’internaute de se rendre compte facilement et immédiatement que la marque de la demanderesse est détournée de son objectif qui est de désigner les produits de la mutuelle, pour servir d’appât pour des produits concurrents".
Rares sont les décisions françaises tenant compte du sens d'un nom de domaine pour caractériser un comportement illicite sur le site auquel il donne accès. Celle-ci est donc à ajouter à la courte liste. Elle permet de préciser que ceux qui font emploi de génériques doivent être vigilants dans le choix des services qu'ils proposent quand ils développent de tels noms.
Dans cette affaire, la demanderesse stigmatisait aussi l'emploi de mutuelle.com. Selon elle, le cabinet se présentait de la sorte "
comme une mutuelle au sens de l’article L112-1 du Code la mutualité".
Si
ce texte définit l'activité des mutuelles, il ne prévoit pas la protection du nom "mutuelle" (contrairement, par exemple, aux lois protégeant des appellations comme "caisse d'épargne" ou "banque populaire"). L'usage d'un tel nom de domaine n'est pas considéré comme déloyal dans ce contexte.
La décision [susceptible d'appel] montre que l'usage de termes descriptifs ou génériques en tant que noms de domaine peut n'être pas neutre sur le plan juridique.
[TGI Paris, 3 mars 2011]