"e- est un néologisme hybride entre lettre, mot et concept, porteur de difficultés de tous ordres". Ainsi s'exprime la Commission générale de terminologie et de néologie dans sa Recommandation sur les équivalents français du préfixe e- publiée au Journal Officiel le 22 juillet 2005 (et repéré par Arnaud).
L'honorable Commission estime que "la signification en est confuse et fluctuante, puisqu'il s'emploie pour désigner indifféremment tout ce qui est lié aux techniques de l'information et de la communication : technique, procédure, missions ou organismes". Aussi suggère-t-elle que le préfixe e- est à "écarter dans tous les cas pour les risques de confusion liés aux incertitudes de prononciation et surtout de sens qu'i[l] recèl[e]", et elle "déconseille l'emploi du préfixe e- sous toutes ses graphies (e-, é-, i-) pour désigner les activités fondées sur les réseaux informatiques et de télécommunication".
En droit des marques, l'usage du e- a déjà été évoqué. Ce fut le cas d'abord dans une ordonnance de référé rendue à Nanterre le 11 décembre 2000. Dans ce contentieux, le demandeur avait argué de "une absence d’originalité résultant de l’emploi courant de la lette "e" dans le monde de l’internet" (ce sur quoi la juridiction ne s'était pas prononcée, l'appréciation de la marque échappant à la compétence du juge de l'urgence).
Une autre décision rendue à Nanterre le 19 novembre 2001 a prononcé la nullité de la marque E-learning, en raison de son caractère générique : "ce terme anglais, à défaut de mot français équivalent choisi par les autorités compétentes en la matière en France, s’est imposé dans le secteur concerné avec la rapidité qui caractérise la communication par les réseaux électroniques et qu’au début avril 2000, il ne présentait déjà plus de caractère distinctif suffisant pour pouvoir être admis comme marque, utilisé seul et de manière non figurative, pour désigner des services de formation en ligne".
Vous avez dit "en ligne" ? C'est l'utilisation de ce mot qui est recommandée par la Commission : "la formule en ligne (...) paraît la meilleure solution dans la plupart des cas", ou alternativement le "préfixe télé-, qu'il convient de privilégier chaque fois que c'est possible sans créer d'ambiguïté, notamment avec des notions relevant strictement du domaine de la télévision ou des activités à distance".
Quant au terme préfixe cyber-, "[i]l peut cependant se révéler utile dans certains cas, ne serait-ce que pour son caractère concret et évocateur. Il convient donc de le conserver lorsqu'il s'est imposé dans l'usage, et, sans s'en interdire l'emploi, de garder à l'esprit que d'autres choix peuvent être préférables".
[Les e-nitiés que la question intéresserait vraiment peuvent aussi lire "Des marques et des e-" publié dans le Dalloz 2000, n° 21 ; à l'époque j'avais osé prédire que les marques dont le préfixe est m- subiraient le même sort... mais le m-commerce (par téléphone mobile) n'a pas eu l'essor annoncé !]
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