Cette fois, son action fut dirigée contre Stéphane H. qui avait "courant 2004, enregistré le nom de domaine hotel-meridien.fr". S'il n'a jamais exploité ce nom, il l'avait "proposé à la vente sur le site de la société Sedo dédié précisément à la vente de noms de domaine de tous ordres". Cette société est également assignée. Sur le site de cette dernière, le nom avait été proposé à la revente pour un prix de 10.000 euros, avec invitation à faire une offre.
La réservation d’un nom de domaine qui n’a pas été activé, et son offre à la (re)vente par l’entremise d'une société, sont-elles contraires au droit des marques ? Une réponse est donnée par ce jugement.*
Les juges observent que les marques revendiquées sont notoires, et fondent leur décision sur l'article L. 713-5 du C.P.I. Ils considèrent que ce texte qui offre une protection élargie s'applique en l'espèce, car il y a un emploi injustifié d'une marque renommée dans un nom de domaine dont la mise en vente engage la responsabilité de celui qui y a procédé. [Le tribunal conclut aussi à la contrefaçon par imitation de l'une des marques du demandeur, déposée en classe 38, mais l'on ne s'attardera pas sur cette considération, qui a perdu de sa portée depuis l'important arrêt Locatour ; toutefois, il est à remarquer qu'ici le défendeur avait proposé le nom à la revente, ce qui n'était pas le cas dans l'affaire Locatour). L'atteinte à la dénomination sociale et au nom commercial du demandeur est également retenue.
Sans balancer - et il n'y avait d'ailleurs pas lieu ! - , les juges concluent à la plein responsabilité de l'auteur de l'enregistrement du nom litigieux.
La plateforme sur laquelle il a cherché à revendre ce nom est-elle également responsable ? Oui disent les juges, qui disent qu’en prenant part, en tant qu’intermédiaire rémunéré, à l’offre à la vente du nom de domaine litigieux, la société a engagé sa responsabilité. Les juges relèvent qu'elle a aidé le revendeur à déterminer un prix de revente. Elle ne peut être considérée comme un registrar neutre ou un hébergeur dont la responsabilité n'est engagée que dans certaines conditions :
la société Sedo est ainsi intervenue comme un intermédiaire dans l’offre à la vente du nom de domaine litigieux qui a mis ses moyens au service de la promotion de cette offre et ce, alors même qu’elle était pleinement consciente de l’atteinte aux droits de la demanderesse que la dite offre réalisait ; que sa responsabilité est pleinement engagée ;Il est à noter que dans la procédure UDRP (exemple) ou à l'étranger (cf. cette discussion sur la liste INTA : 1 & 2), l'activité de revente de noms de domaine n'est pas nécessairement vue comme portant atteinte aux droits des tiers.
Attendu, en effet, que son rôle est exclusif de celui d’un prestataire technique au sens de la loi du 21 juin 2004 pour "la confiance dans l’économie numérique" ou de celui de prestataire d’enregistrement de nom de domaine dont elle ne peut revendiquer le statut ;
* Tribunal de grande instance de Paris 3ème chambre, 2ème section Jugement du 23 septembre 2005, publié sur Legalis
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