Un récent article du E-commerce Times donne l'occasion d'aborder le marché de la revente de noms de domaine, sous l'angle juridique.
Suite au rachat d'Afternic et de son portefeuille de 675.000 noms, le nouveau propriétaire a immédiatement décidé d'abandonner des noms susceptibles d'attirer des difficultés : actions en contrefaçon, atteintes aux moeurs ou aux confessions, etc.
La plateforme de revente de noms d'Afternic est concurrente de celle de Sedo, et de Moniker Online Services. Tous trois sont des acteurs qui, selon des modalités différentes, facilitent le rachat de noms de domaine de plus ou moins grande valeur.
Afternic et Sedo ne font pas payer le "parking" des noms sur leurs pages ; ces sociétés perçoivent une commission sur le prix de la revente. Comme il est d'usage pour les opérations de transfert de noms de domaine, le prix d'acquisition est versé au moyen d'une société spécialisée jouant le rôle de séquestre. Le placement de noms à vendre sur des pages peut aussi permettre de toucher de l'argent via des systèmes de pay-per-click.
Proposer un nom à la revente sur ces places de marché peut-il constituer un élément retenu à charge contre le revendeur, à l'occasion d'une procédure contentieuse en récupération du nom ? Si de telles offres de revente sont régulièrement utilisées comme des indices de la mauvaise foi des titulaires dans les procédures UDRP, tel n'est pas toujours le cas.
Il a ainsi été jugé que n'est pas illicite l'acquisition de noms génériques pour en proposer la revente, dès lors que le revendeur cherche à exploiter la valeur intrinsèque de ce terme générique, peu important qu'il existe par ailleurs une marque identique. De la même façon, il a été jugé que l'usage à des fins publicitaires d'un nom générique proche d'une marque n'est pas de nature à entraîner le transfert du nom au titulaire de cette marque. On trouve encore d'autres décisions UDRP indiquant que la simple offre de revente n'est pas suffisante à caractériser l'absence d'intérêt légitime ou de bonne foi.
Ces décisions ne reflètent pas nécessairement la tendance générale de la jurisprudence UDRP. Dans le contentieux judiciaire français, la revente sur un site spécialisé est retenue contre le titulaire. Il faut observer que les juges se sont ainsi prononcés dans des affaires d'usurpation de marques ou de noms de famille de personnalités, pas dans des affaires portant sur des noms de domaine génériques.
Depuis quelques mois, on voit des juridictions étendre la condamnation à la place de marché. Ainsi en 2005 l'une d'entre elles a-t-elle été jugée responsable en tant qu'intermédiaire qui propose ses services, diffuse sous son nom et sur son site le nom litigieux, fournit une expertise, et perçoit une commission sur la vente. Dans cette affaire, il fut établi que la place de marché agissait en connaissance de l'atteinte aux droits du titulaire de marque, ce qui permettait de caractériser sa faute.
Dans une autre affaire (2006) dans laquelle une place de marché de noms de domaine était défenderesse, il a été enjoint à celle-ci d'interdire de reproduire directement ou indirectement et d'utiliser de quelque manière et à quelque titre que ce soit tous signes pouvant constituer une contrefaçon des marques du demandeur, ou de créer un risque de confusion avec celle-ci.
La première affaire était relative à une marque notoire ; la seconde fait suite à une demande d'interdiction obtenue en référé. Cela n'est pas suffisant pour en tirer des conclusions définitives sur le cadre juridique applicable aux activités des places de marché professionnelles, ou sur le régime juridique des opérations qu'elles passent ou permettent de passer. Par ailleurs, la diversité des situations (en fonction des caractéristiques du nom, de la nature des opérations) rend délicate la formulation d'une réponse définitive à la question de la licéité de certaines de ces activités.
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