En septembre 2006, une décision PARL avait été rendue à propos du nom voyagedeluxe.fr, en faveur de son titulaire la société De Fracl Investissements. L'expert avait jugé n'était pas rapportée la preuve d’un enregistrement et/ou d’une utilisation du nom de domaine litigieux en violation des droits des tiers. La société DF Presse, qui attaquait, était donc perdante.
Ces deux sociétés se sont retrouvées devant les juridictions parisiennes. Visiblement, le tribunal de commerce de Paris n'a pas eu la même opinion que le centre d'arbitrage de l'OMPI : il a ordonné (13 septembre 2007) que la société De Fracl Investissements procède "dans les trente jours à compter de la signification du jugement, au transfert, à ses frais, du nom de domaine voyagedeluxe.fr au profit de la société DF Presse" (assortissant cela d'une astreinte de 500 €/jour, et d'une indemnité de 5.000 €). La société De Fracl a fait appel du jugement du tribunal de commerce.
S'agissait-il d'un recours formé contre la décision PARL (ce que permet son article 10) ? Ou d'un litige né de faits nouveaux ? Toujours est-il qu'il semble que l'on soit face à la première affaire à propos d'un nom en .fr qui soit jugée de part et d'autre du Lac Léman.
Il semble que c'est la seconde hypothèse qui doit être retenue, et que l'utilisation du nom voyagedeluxe.fr a évolué après la procédure, son titulaire ayant vraisemblablement choisi de le mettre en parking. En effet, là où l'expert OMPI n'avait pas vu de risque de confusion, la cour d'appel de Paris relève quant à elle que la page d'accueil "renv[oie] l'internaute, au moyen de liens hypertextes, à des sites de voyages tels que directours.com, promovacances.com, easyvols.fr, opodo.fr".
Dans ces conditions, la cour juge que la reproduction du nom commercial sous lequel DF Presse édite un magazine, engage la responsabilité de la société De Fracl.
La décision est critiquable : l'édition d'un magazine spécialisé dans les voyages haut de gamme, sous le signe (non distinctif !) Voyage de Luxe, donnerait donc la possibilité à son titulaire de s'opposer à ce qu'il puisse être fait un usage de la même expression générique sur internet ?
La situation est d'autant plus fâcheuse qu'il ressort de l'arrêt que la société avait apparemment cédé à un particulier le nom en janvier 2007, soit avant le début de l'affaire. C'est donc ce tiers qui aurait basculé le nom en parking. La société, whois et attestation du registrar à l'appui, donnait les coordonnées du nouveau titulaire. Mais comme le demandeur alléguait qu'une lettre adressée par son avocat à l'adresse de ce nouveau titulaire "a été renvoyée avec la mention inconnue", cela suffit à la cour pour estimer... qu'en fait il n'y a pas eu de cession !!! Que la cour se contente de cette seule preuve du demandeur est stupéfiant... et amène aussi à revoir la pratique contractuelle : pour éviter que les agissements de la personne à qui un nom est cédé se retournent contre celui qui cède le nom, il faudrait donc désormais se garantir contre les agissements futurs et les encadrer ?
Manifestement, une erreur d'appréciation de la Cour d'appel de Paris.
[Paris, 17 décembre 2008]
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