C'est une bien intéressante décision que vient de rendre le centre d'arbitrage de l'OMPI dans un conflit portant sur le nom elephant.com.
Il s'agit d'un nom de domaine qui correspond aussi à un nom commun, et l'on sait que quand les noms disputés ont cette particularité, les décisions sont en général favorables aux titulaires de ces noms (par exemple, acrylite, allocation, avengers, concierge, dogs, bassets, enchilada, exclaim, magic, merinos, parachute, pi, piper, pueblo, sting, tchin-tchin, thyme, zero... et la liste est loin d'être complète).
Le demandeur ici était une compagnie d'assurances britannique, titulaire de la marque Elephant depuis la fin du vingtième siècle. Le titulaire actuel du nom de domaine n'en jouit que depuis 2004 ; chose que l'on ne lit pas souvent dans les affaires de ce type, il s'agit d'un nom qu'il avait racheté à un précédent titulaire, pour un montant de 22,500 $ semble-t-il (l'affaire ne dit pas si les taxes étaient incluses...). Quelques mois plus tard, alors que la compagnie d'assurances approchait le nouveau titulaire pour lui proposer un rachat, celui-ci refusait toute négociation en dessous d'un million de dollars, indiquant que trois offres lui avaient déjà été faites [commentaire au passage : à supposer que des pourparlers avec l'un ou l'ensemble de ces trois personnes intéressées avaient débuté dans le cadre d'un accord de confidentialité, il aurait fallu que le défendeur le viole pour prouver la réalité de ces offres ; et à l'inverse, l'une des limites de la procédure UDRP comparée au droit procédural national est qu'elle ne permet pas à l'entité chargée de trancher d'obtenir communication de ces documents, malgré l'article 12 des règles d'application, la procédure ayant un caractère public].
Autre élément singulier : le demandeur reproche à son adversaire la présence de liens vers des sites où sont proposés des produits d'assurance. Il y voit le signe de l'intention du défendeur d'utiliser le nom elephant.com à des fins lucratives, donc une preuve de cybersquatting. Le défendeur, qui rappelle que son site est consacré aux éléphants, ne nie pas que de tels liens aient figuré sur ses pages, mais qu'ils étaient proposés au travers de publicités Google Adsense, dont le contenu est fabriqué par Google et avec lequel le défendeur ne peut contractuellement interférer ! Les arbitres ne s'y sont pas trompés ;-) et ont retenu cet argument.
Le nom de domaine existait depuis 1996, la marque a été enregistrée ensuite. A cet égard, les experts rappellent que ce n'est pas de la date du premier enregistrement dont il faut tenir compte dans l'hypothèse de transferts postérieurs du nom, mais de la date de la dernière opération sur ce nom, qui est elle-même techniquement un nouvel enregistrement.
Ensuite, la question de l'identité entre les signes disputés n'est évidemment pas discutée. Puis ils considèrent que le défendeur était ignorant de l'existence de la marque britannique Elephant lors qu'il a acquis le nom [et de la marque française de thé Elephant ? :~)], expliquant enfin qu'il est normal d'utiliser un terme générique pour évoquer un genre animal !
Admiral Insurance Services Limited v. Mr. Adam Dicker, WIPO Case No. D2005-0241, June 4, 2005.
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