June 07, 2006

L'usage d'un nom proche d'une marque, à des fins publicitaires, n'est pas considéré comme du cybersquatting

Une procédure UDRP, la marque d'un voyagiste connu (au moins en France), un défendeur coréen : la combinaison de ces éléments laisse en général deviner que le nom du second sera transféré au premier. Tel n'est pas le sens de cette décision à propos de jettour.com (décision D2006-0250 signée Warwick Smith, David Sorkin et Pierre-Yves Gautier).

Le demandeur est titulaire, notamment, de la marque communautaire Jet Tours, et du nom de domaine jettours.com. Enregistré pour la première fois en 1997, le nom de domaine litigieux n'a été transféré à l'actuel titulaire et défendeur qu'en 2005. Celui-ci a indiqué en défense qu'il a pour activité d'enregistrer des noms génériques disponibles. En l'occurrence, le nom contesté était exploité sur une page comportant de mulitples publicités. Quoiqu'il prétende ne pas connaître la marque qui lui est opposée, il est observé que certaines des publicités sont en français, ou pour des destinations françaises, et qu'est parfois utilisé "Jet-Tour".
Si le défendeur ne nie pas la présence de ces publicités, il argue qu'elles ne peuvent révéler son éventuelle mauvaise foi. En effet, ces publicités sont des publicités contextuelles, créées par Yahoo! Search Marketing ; notamment, ces publicités changent en fonction de la localisation géographique de celui qui les consulte (utilisation de l'adresse IP). Le demandeur ne conteste pas cela, mais relève dans les conditions d'utilisation des services de Yahoo! Search Marketing que le client est seul responsable du contenu figurant sur son site, et qu'il s'engage à ne pas porter atteinte aux droits des tiers.

Il est jugé que le nom de domaine et la marque sont similaires au point de prêter à confusion, ce qui ne fait pas débat.
Le panel considère ensuite qu'il n'y a pas chez le défendeur de droit ou d'intérêt légitime au sens où l'on entend habituellement cette condition. Le défendeur avançant que son nom était générique, ce qui lui donnait un droit à l'exploiter, le panel va décortiquer des décisions rendues dans des cas semblables, pour poser la règle de son raisonnement : certes il est légitime d'enregistrer un nom générique, mais seulement dans le cas où l'usage de ce nom n'empiète pas sur les droits du titulaire d'une marque semblable. Qu'en est-il en l'espèce ? Au terme de longs développements, qui s'arrêteront sur le caractère générique ou non de jettour, puis sur l'intérêt légitime du défendeur au moment de l'enregistrement, et ses intentions, le panel ne tranche pas la question.
C'est sur la question de la bonne ou mauvaise foi que se joue l'issue du litige. Or le demandeur n'a pu prouver (1) que le défendeur avait à l'esprit sa marque quand il a enregistré le nom, (2) que la marque communautaire était connue en Corée du Sud, lieu d'activité du défendeur qui par ailleurs n'exerce pas en Europe, (3) que la marque était connue au-delà du secteur du voyage, alors que l'activité du défendeur est publicitaire, (4) que le défendeur était de mauvaise foi en enregistrant un nom dont il est acquis qu'il est générique en langue anglaise, (6) et que le fait que le défendeur ait caché son identité dans le Whois n'est pas en soi suffisant pour caractériser la mauvaise foi.

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